Au 184 rue du Faubourg Saint-Honoré, là où le luxe parisien s’égrène entre maisons de couture et ambassades, L’Attilio Paris orchestre un dialogue gastronomique qui transcende les frontières. Pour cette saison automnale, le chef Attilio Marrazzo réaffirme sa partition : marier l’âme campanienne aux produits nobles du terroir français, sans jamais céder aux facilités du fusion mal maîtrisé.
L’Automne comme manifeste culinaire
La nouvelle carte déployée célèbre les produits emblématiques de la saison avec une rigueur presque militaire : potimarron, cèpes, truffe noire, châtaigne, Saint-Jacques. Chacun de ces ingrédients devient prétexte à une exploration technique où se télescopent savoir-faire transalpin et excellence hexagonale. L’exercice n’est pas neuf – la cuisine italo-française irrigue la scène parisienne depuis des décennies – mais rares sont les établissements qui parviennent à maintenir l’équilibre entre authenticité méditerranéenne et sophistication parisienne.
Attilio Marrazzo, natif de Campanie, revendique cet héritage double. Formé aux côtés de Sergio Mei au Four Seasons de Milan, il traverse les Alpes en 2006 pour s’immerger dans l’univers exigeant de Joël Robuchon, chef le plus étoilé au monde, avant de parfaire son vocabulaire culinaire au Pavillon Elysée, à La Table, à l’Atelier Étoile et au Georges V. Ce parcours initiatique dans les cuisines les plus exigeantes de la capitale forge une signature où la générosité italienne rencontre la précision française.
Trois espaces, trois expériences
L’architecture même de L’Attilio traduit une hiérarchie expérientielle pensée. Au rez-de-chaussée, le bistro cultive la spontanéité méditerranéenne : lumière naturelle, assiettes colorées inspirées des marchés, atmosphère accessible. Le soir venu, les lumières se tamisent, les bougies scintillent, et l’ambiance glisse vers une intimité plus feutrée, propice aux confidences conviviales.
À l’étage, le restaurant gastronomique impose un changement de registre. Ici, chaque service devient performance, chaque plat un acte d’une pièce savoureuse orchestrée avec une précision horlogère. Le menu se décline en cinq ou sept services, autant d’étapes narratives où le chef raconte son histoire entre deux cultures. La cuisine ouverte permet d’observer le ballet des gestes, cette chorégraphie technique qui transforme les produits bruts en compositions élaborées.
Mais c’est au dernier étage que se niche le privilège ultime : la Table du Chef, espace confidentiel limité à douze convives. Attilio Marrazzo y officie à quelques mètres seulement, partageant les histoires, les gestes et les inspirations derrière chaque création. L’expérience devient alors presque initiatique, où la gastronomie se vit dans sa dimension la plus intime, accompagnée des plus belles bouteilles de la cave.
Quelques créations automnales
Parmi les propositions de cette carte renouvelée, plusieurs compositions révèlent la grammaire du chef. Les gnocchi de potimarron associent un crémeux de gorgonzola de bufflonne, de l’ail noir et des poires caramélisées – mariage audacieux entre douceur sucrée et caractère fromager puissant. Le risotto Vialone Nano propose un crémeux de cèpes et des noix croquantes, dialectique texturale qui joue sur les contrastes. Les noix de Saint-Jacques s’accompagnent d’un velouté de chou-fleur à la vanille et d’une tempura croustillante, alliance inattendue qui révèle la curiosité technique du chef.
Au registre des desserts, le Mont Blanc revisité façon Pavlova intègre meringues croustillantes et sorbet cassis, tandis que le tiramisu demeure un hommage aux classiques italiens, avec son boudoir maison imbibé au café Lavazza et son crémeux mascarpone.










Le pari de L’Attilio s’inscrit dans une dynamique plus large de revalorisation de la cuisine italienne à Paris, longtemps cantonnée aux trattorias bon marché ou aux pizzerias de quartier. Depuis une décennie, plusieurs établissements ont entrepris de restituer à cette gastronomie sa dimension noble et technique : de Passerini à Racines, en passant par Chez Minnà, une génération de chefs italiens réhabilite les savoir-faire péninsulaires avec une exigence comparable à celle de la haute gastronomie française.
L’adresse du Faubourg Saint-Honoré, artère emblématique du luxe parisien, ancre L’Attilio dans un territoire symbolique où l’excellence est norme et non exception. Attilio Marrazzo y cultive une vision : offrir des lieux élégants mais accessibles où l’on se sent immédiatement chez soi, tout en préservant l’authenticité des saveurs. Cette ambition – concilier raffinement et simplicité, sophistication et convivialité – constitue sans doute le défi le plus ardu de toute entreprise gastronomique contemporaine.
Le chef dirige également La Table du Château de Noirieux, près d’Angers, confirmant sa capacité à déployer sa vision au-delà de la capitale. Cette double implantation témoigne d’une ambition entrepreneuriale qui n’entrave pas la qualité de l’exécution, preuve que rigueur organisationnelle et créativité culinaire peuvent cohabiter.
La dolce vita comme philosophie
Au-delà des produits et des techniques, L’Attilio revendique une philosophie : cultiver l’art de la dolce vita. Cette notion, souvent galvaudée par un marketing touristique superficiel, retrouve ici sa dimension première – celle d’une élégance du quotidien, d’une capacité à transformer le repas en moment suspendu, où le plaisir gustatif se double d’une sociabilité apaisée.
Dans un secteur où la course aux distinctions et aux reconnaissances médiatiques peut parfois étouffer la spontanéité, cette revendication d’une simplicité du beau mérite d’être soulignée. Reste à vérifier si cette ambition résiste à l’épreuve du service quotidien, si l’accessibilité annoncée ne se heurte pas aux tarifs nécessairement élevés d’un établissement situé dans l’un des arrondissements les plus onéreux de Paris.
L’automne 2025 de L’Attilio s’annonce comme une célébration des produits nobles et des mariages culturels réfléchis. À la carte ou dans les menus dégustation, la proposition invite à une promenade entre Campanie et terroir français, sous la conduite d’un chef qui a su faire de son double héritage une force plutôt qu’une contrainte.
Informations pratiques
L’Attilio Paris
184 rue du Faubourg Saint-Honoré, 75008 Paris
Site officiel : www.lattilio-paris.com

