Home ModeRien : l’insoumission olfactive signée État Libre d’Orange, manifeste cuiré de la parfumerie de niche

Rien : l’insoumission olfactive signée État Libre d’Orange, manifeste cuiré de la parfumerie de niche

by pascal iakovou
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Il y a des parfums qui se contentent de plaire ; Rien préfère provoquer. Véritable brûlot olfactif imaginé par le parfumeur Antoine Lie et dévoilé en 2006 parmi les premières créations d’État Libre d’Orange, ce cuir fumé revendique son nom comme un pied-de-nez, un paradoxe qui signifie… tout.

Une architecture de contraste

Dans sa composition, plus de 80 notes s’entrechoquent. L’ouverture réveille immédiatement l’épiderme : poivre noir, safranéline et encens créent un claquement d’épices et de résines presque métallique . Puis surgit le cœur cuiré, texturé par l’iris et la ciste, qui épaissit la trame sans l’alourdir. Enfin, le fond livre un sillage dense — patchouli Orpur®, vétiver Orpur® et mousse d’arbre —, évoquant le bitume chaud ou la nappe d’un club enfumé. Le résultat : un chypre cuiré d’une profondeur quasi tactile, oscillant entre caresse de velours et morsure de fouet.

De la provocation à l’aura culte

Quand la marque parisienne, fondée par Étienne de Swardt, le lance, la critique salue un geste punk : Rien détourne le romantisme habituel du patchouli, amplifie la facette « bandit » du cuir, et impose un nouveau vocabulaire pour la parfumerie dite de niche. Huit ans plus tard, Rien Intense Incense poussera encore le curseur du sulfureux, surdosant encens et accord goudronné (lancée en 2014).

Un manifeste éthique et accessible

État Libre d’Orange revendique un flacon unique pour toute la collection, limitant le gaspillage, et une production 100 % française. Rien se décline en Eau de Parfum 50 ml (100 €) et 100 ml (155 €), ainsi qu’en bougie végétale (49 €) . La maison refuse la segmentation genrée : cuir, épices et mousse s’adressent à celles et ceux qui considèrent le parfum comme un manifeste plus qu’une parure.

Pourquoi maintenant ?

À l’heure où les jus fruités-gourmands saturent les linéaires, Rien rappelle que l’audace reste une valeur cardinale du luxe contemporain. Dans les cercles de collectionneurs, il figure parmi les cuirs de référence avec Bandit de Robert Piguet ou Cuir Mauresque de Serge Lutens. Son retour médiatique s’inscrit dans une vague de redécouverte des classiques récents : les parfums cultes des années 2000 gagnent une génération prête à troquer la conformité pour le caractère.

Rien n’est pas qu’un parfum : c’est un rite initiatique. Un halo magnétique, sauvage mais sophistiqué, qui signe la peau comme une épigramme. Insolent hier, indispensable aujourd’hui — et toujours aussi inoubliable.

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