Home ModeFashion WeekPhan Huy dévoile un « Portrait de campagne vietnamienne » au Palais de Tokyo

Phan Huy dévoile un « Portrait de campagne vietnamienne » au Palais de Tokyo

by pascal iakovou
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La passerelle de béton brut du Palais de Tokyo se métamorphose en sentier de latérite : au fil d’une musique jouée au đàn bầu, Phan Huy fait surgir sa campagne natale au cœur de Paris. Chaque sortie est un instantané sensitif — odeur de paille brûlée, bruissement du bambou, éclat d’un soleil zenithal sur le Mékong — traduit en couture d’exception.

Les petites choses qui sculptent la mémoire

Une ** feuille de bananier ** se déploie en crinoline d’organza ciselée ; un papier-vent reparaît en éventail brodé de cristal greffé à la taille ; le nón lá se métaphorise en corset tressé de cordes soyeuses, incrusté d’éclats stardust. Rien de folklorique : Phan Huy effleure le souvenir plutôt qu’il ne l’illustre, dosant la précision du motif et la légèreté du geste.

Du champ au catwalk : vocabulaire technique

Le créateur pousse plus loin sa maille élastique irisée : un voile polymorphe qui capte la lumière et épouse la gestuelle telle l’onde d’un ruisseau. Sur d’autres looks, un tressage à la manière des paniers de pêche devient basque architecturale ; le techno-plissé évoque les sillons d’une rizière à flanc de colline. La palette terreuse — jaune “gras de poulet”, brun argile, rouge brique, poussière de chaux, reflets d’argent — renvoie à la mosaïque de couleurs d’un village au couchant.

Couture d’émotion, couture de sens

Loin d’une nostalgie figée, Phan Huy déclare « honorer les petites choses ». Ainsi, une robe « Filet » simule l’étreinte de la rivière par un drapé filet en soie lurex, tandis qu’une cape « Charbon » reproduit la fumée des foyers ruraux via une teinture dégradée anthracite-cendre. Les 36 silhouettes, toutes cousues main, privilégient la fluidité : les épaules s’arrondissent comme la voûte d’un toit de chaume, les jupes frémissent tel un champ de riz mûr sous le vent.

Entre passé et devenir international

En choisissant l’immense vaisseau brut du Palais de Tokyo, la maison oppose la rugosité urbaine à la délicatesse d’une vie champêtre : choc visuel qui raconte aussi la trajectoire d’une marque encore émergente, désormais admise au cercle restreint de la couture parisienne. Vision romantique sans mièvrerie, Phan Huy signe une collection manifeste : l’excellence artisanale vietnamienne n’est plus cantonnée au souvenir ; elle se conjugue au présent et regarde l’avenir, portée par un designer qui glane ses histoires sous les toits de chaume mais les raconte sous les lumières de la capitale.

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