Home ModeFashion WeekGeorges Chakra FW 25-26 : l’éclat discret d’un film noir, entre tension et révélation

Georges Chakra FW 25-26 : l’éclat discret d’un film noir, entre tension et révélation

by pascal iakovou
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Il est dix-huit heures, quelque part entre Beyrouth et les coulisses d’un vieux palace hollywoodien. Un rai de lumière griffe le rideau, le plancher s’embrase d’un bleu nuit dense ; déjà, la caméra intérieure s’allume et l’on pressent la trame d’un film noir écrit au fil de satins et de silences.


Le noir, palette habité ; l’argent, soupir latent

Une poignée de nuances suffit : noir d’encre, bleu orage, lichen givré, rose fané, argent liquide. Sur ce canevas crépusculaire, Chakra applique la gouache des contrastes : mikado austère contre mousseline bruissante, dentelle arachnéenne qui flirte avec un lamé froid, taffetas crépitant au contact d’une soie fluviale. Rien n’est criard ; tout s’articule en demi-tons, comme ces voix feutrées que l’on devine derrière la porte capitonnée d’un club clandestin.


Silhouettes : cage thoracique, ligne de fuite

Épaules architecturées, taille saisie d’une ligne nette ; le souvenir d’un tailleur 40 qui planait sur une enquêtrice fatale.
Corsets origami, ponctués de nervures qui respirent – jamais une prison, toujours un écrin.
Fourreaux liquides glissant jusqu’au parquet, fente latérale comme une confidence retenue.
Traînes-nuages en tulle fumé ; elles voltigent, s’évanouissent, laissent derrière elles un parfum d’inachevé.

Chaque robe se fait plan-séquence : un ralenti sur la hanche, un zoom sur l’omoplate, un cut abrupt dans la lumière.


Orfèvrerie du murmure

Ici, l’ornement est un souffle : un liseré d’étain stellaire qui ourle une manche, un éclat de cristal piqué comme point de suspension, une broderie de jais qui surgit puis s’efface. Chakra pratique la luxure sous-voix ; il invite la lumière sans jamais crier son nom.


45 tableaux comme des intertitres

Maryna surgit en cape bleu-encre, Daria s’allonge dans un lamé de lune ; chacun des 45 passages est une vignette arrêtée sur pellicule. On entend presque craquer la pellicule, on croit sentir le velours rouge du rideau. Le défilé n’est plus défilé : c’est une bande annonce d’un polar à venir, où l’héroïne se coiffe d’ombres et de soie.


Épilogue

Quand le silence reprend possession de la salle, il reste une traînée de phosphène argenté derrière les paupières : preuve qu’un glamour peut se faire chuchoté et, par sa seule retenue, incendier l’imaginaire. Chez Georges Chakra, le noir est un dangereux équilibre ; un seuil où la lumière hésite avant de se livrer. On y entre sur la pointe des pieds comme dans un rêve… on en ressort la gorge brûlante d’avoir frôlé l’incendie.

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