Home ModeFashion WeekZiggy Chen SS26 : PRITRIKE, l’élégie textile d’un monde primitif revisité

Ziggy Chen SS26 : PRITRIKE, l’élégie textile d’un monde primitif revisité

by pascal iakovou
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Dans l’univers silencieusement radical de Ziggy Chen, chaque saison est un rite. Pour le printemps-été 2026, le créateur basé à Shanghai dévoile PRITRIKE, contraction poétique de « Primal » et « Strike », telle une collision de forces premières et d’élans instinctifs domestiqués par la main humaine. Présentée le 28 juin dernier à Paris dans le cadre de la Fashion Week Homme, la collection résonne comme une offrande méditative à la nature, à la matière et au temps.

Les vêtements, aux coupes généreuses et spontanées, suggèrent un abandon maîtrisé. Ils évoquent la pluie estivale de Jiangnan — persistante, douce, vivifiante — qui semble s’être infiltrée jusque dans les fibres. Coton, soie, lin, chanvre : les matières organiques sont enrichies de traitements singuliers comme la teinture artisanale ou la superposition de feuilles d’or, conférant aux surfaces un éclat patiné. Une rugosité première, rendue tactilement luxueuse.

Les couleurs glissent d’un noir profond et originel vers un blanc sali, presque fané. Entre ces deux pôles s’étire un spectre chromatique aux nuances usées : pierre altérée, laque écaillée, papier peint fané, béton battu par le vent. Il s’agit moins de nostalgie que de transfiguration — l’usure devient langage, la patine, signature.

Les imprimés traduisent le geste accidentel de l’eau sur les murs : des gouttes de pluie qui, en perlant, déforment l’encre et la matière. Ces motifs évoquent des souvenirs visuels silencieux, presque enfouis, réactivés par un vêtement qui se veut archive du sensible.

Ziggy Chen, assisté de Noey Park au stylisme et d’Alessandro Tinelli pour la photographie et la musique, façonne une narration dense et intime, fidèle à sa grammaire visuelle. Le casting orchestré par Lucian Casting et les accessoires en collaboration avec Rigards et iolom parachèvent cet univers où chaque détail parle d’origine, d’érosion et de permanence.

PRITRIKE est moins une collection qu’un paysage intérieur. Elle murmure plus qu’elle ne proclame, tissant une alliance entre l’humain et les éléments, entre la mémoire textile et la géographie affective. Une proposition rare, viscéralement cohérente, dans le vacarme bavard des défilés.

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