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Haute couture : le réveil signé Julien Fournié et Schiaparelli

by Manon Renault
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Mercredi, la nouvelle tombe :Julien Fournié et Schiaparelli obtiennent l’appellation haute-couture. “Haute-couture”, plus qu’un titre : la promesse d’un renom éternel, le certificat d’un prestige. Pourtant pendant la décennie 2000 elle disparaît des écrans radars. Faramineuse, trop opulente et prix inaudible : l’excédent devient vulgaire, politiquement incorrect. Le haute-couture est réduite à son aspect financier et le bling bling qui en découle. Aujourd’hui Julien Fournié et Schiaparelli s’ajoutent à la petite liste des maisons pouvant proposer des vêtements, des robes, des parures d’un luxe sans prix, d’un rêve sans menaces de réveil. Ne parlons plus de mode, parlons d’art.

Renaissance, nouvelle vie : il est temps de comprendre que la mode résulte d’un processus artistique unique et minutieux, fruit d’esprits créatifs, génie de leur temps, passeur de savoir-faires. La haute-couture, un poème avec de nouvelle rimes


Sauver les gestes et les savoirs

La haute-couture reste dans les esprits un écrin brillant réservé à des snobs qui batifolent dans des dîners mondains. De grands noms comme Chanel, Dior ou Lanvin auréolant le mythe auprès du grand public. Les crises économiques de ces dernières années auraient pu sonner le glas d’une haute-couture confondue avec son aspect financier.

En 1968, la fermeture de l’atelier couture de Cristobal Balenciaga suscitte une vive inquiétude. Les temps changent.  

Pourtant l’art de la discrétion, la recherche de l’exception, procurer aux clients le sentiment d’être unique et disposer d’un savoir-faire plus précieux que les millions de dollars engrangés par l’industrie d’une mode à la chaîne retrouve toute son importance.

Si Karl Lagerfeld rend de manière récurrente hommage à ses petites-mains, c’est qu’elles sont les fées précieuses qui permettent de retrouver un chemin dans la pénombre des enseignes. La lumière doit leur être accordée.

Sans les grandes maisons de couture, ce sont des gestes et des savoirs précieux qui disparaissent. Sans les petites-mains, fini les grands rêves.  

Elsa Schiaparelli : funambule dans l’histoire de la mode

Elisa Schiaparelli

De ces coups de maîtres des pièces iconiques naquirent. Elles demeure une  source d’inspiration pour  la création moderne, tant dans le monde de l’art contemporain (Jeff Koons et ses homards), que dans la pop culture ( Lady Gaga : entre chapeau chaussure et homards-une fois encore). Pourtant son sigle ne s’imprime pas sur des millions de magazines à travers le monde. En 1956, la maison Elsa Schiaparelli s’éteint. Il faut attendre Diego Della Valle ( patron de Tod’s) pour ranimer la flamme. Une flamme qui n’a jamais cessé de brûler, mais fragile. Une bourrasque de trop pourrait être fatale.

Bertrand GuyonBertrand Guyon est chargé de conter le nouveau volet qui redonnera lumière à la “seconde “ de l’histoire de la mode des années 30. Quant à ce jeune breton, c’est aussi à la manière d’un conte que son parcours se forge. C’est avec les yeux, emplis par la candeur de l’enfance qu’il découvre des robes du soir dans les suppléments de Vogue. Patou, Saint Laurent, Dior deviennent ses enchanteurs. Il plonge dans la haute couture, sans savoir encore ce que cela implique. Il apprend avec les plus grands : Lacroix . Amour des matière et sens de proportions : à la tête de Schiaparelli c’est un jeux d’équilibriste qui l’attend. Trouver le juste taux d’excentricité , à contrebalancé avec une pointe de modernité qui ne salit pas la tradition . L’héritage de Schiaparelli ne doit plus être celui qui nous a été dit . C’est au créateur de reprendre le fil du conte : et de nous guider. Bertrand Guyon découvre constamment, et se surprend d’une Elsa Schiaparelli plus minimaliste, toujours élégante. C’est sans filet, bien sûr qu’il présentera la nouvelle collections haute-couture.

Julien Fournié : les pulsions visionnaires d’un grand spectateur

Comblé par les trésors de Paris et le charme des passantes dont il redessine la silhouette, Julien Fournié, comme son père ( son héros) redonne la vue. Il combine les images, révèle la beauté de chefs d’oeuvres oubliés à coup de pop culture dans des défilés à la joie solennelle. Julien Fournié, un alchimiste :  le pari de combinaisons uniques ou toutes les formes de cultures se côtoient sans hiérarchies. Une conception qui se traduit dans des collections uniques ou toutes clientes se trouvent.

Regarder plutôt que voir : c’est ainsi qu’il faut approcher les pièces du jeune couturier. Julien Fournié s’entoure des meilleurs artisans français: ses collaborations sont le fruit d’une confiance et d’un respect profond envers la couture et ses rituels. Pour autant traditions ne veut pas dire momification: la mode évolue. Le fashion Lab résulte de cette ambition. Développer de nouvelles méthodes et travailler en France; lier petites mains et nouvelles technologies : pourquoi voir ici des paradoxes formant une obstruction à la création. Gorgé d’espoir, ce travailleur invétéré fonde sa maison en 2009. Après avoir collaboré avec les plus grand et créer avec Jean-Paul Gaultier pour Madonna, Julien Fournié se lance en solo. Peur ? Peut-être, mais sa joie, sa force, sa capacité à affirmer son originalité lui permettront de vaincre tous les « vilains » de la culture cinématographique. Culture qu’il maîtrise et honoré dans ses vêtements. Julien Fournié tisse aujourd’hui un renouveau dans le monde de la mode. Si Elsa Schiaparelli avait su trouver chez les avant-gardiste des acolytes inédits à un monde de la couture clôt, Julien Fournié introduit de nouvelles références culturelles, mais surtout tire profit des nouveaux savoirs technologiques. Vivre avec son temps. Si pour Camus, tout artistes est embarqué dans la galère de son temps, ce n’est pas une galère que Julien Fournié dirige. Non, c’est plutôt en haut du far qu il éclaire la couture avec un large sourire. 

 

La suite …Des visages et des figures

De nouvelles maisons, de nouvelle techniques mais aussi le maintien des savoirs et de l’histoire de la haute-couture. De nouveaux visages et le retour de figure ( Saint Laurent en 2015).

Fin de l’hégémonie Française : Armani Privé en 2005, puis le label libanais Elie Saab. D’ailleurs c’est  Pier Paolo Piccioli et Maria Grazia Chiuri encore à la tête de Valentino, qui ont le mieux définit la haute couture : « It’s like customizing your life; it means uniqueness. »

Haute-couture, prêt-à porter, semi-couture, prêt-à couture : perdu dans le tourbillon des appellations, un méli-mélo où l’essence de la couture s’est évaporé. Redonner sens à ce symbole qui a plus d’un siècle, c’est le défi de Julien Fournié et Bertrand Guyon.

La haute-couture n’a pas à se laisser endiguer sous des aphorismes sans sens : le prêt-à couture : près de la couture mais moins d’y parvenir ?  

Les prochains défilés de haute couture se tiendront du 22 au 26 janvier.

Side B

 

 

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