L’Atelier style par l’Atelier Edgar Hamon

2,K

Ce qui fait la force de la haute-couture, c’est bien entendu la qualité de ses créateurs mais également la multitude de petits artisans qui créent et fabriquent du merveilleux et de l’unique. Ce savoir-faire sans pareil est la force de la mode et au delà de la Haute-Couture française. Que ce soit au niveau du vêtement, des bijoux ou simplement des accessoires, tant de corps de métiers différents interviennent et font des merveilles.

Le quartier du Sentier à Paris ne contient pas que des grossistes mais regorgent de trésors au détour de petites rues. Dans les petites rues étroites existent encore des ateliers d’artisans passionnés par leur métier. Ainsi au 5 rue d’Uzès, une plaque indique sur la porte d’un immeuble en pierre et fer forgé de l’époque de Gustave Eiffel « Edgar Hamon parurier« . A l’abri des regards, une vingtaine d’artisans mettent tout leur savoir-faire au service des plus prestigieuses maisons de couture en façonnant à la main et parfois selon des techniques anciennes des accessoires. Les archives de la Maison regorgent d’ailleurs de noms de marque les plus prestigieuses les unes que les autres. Réservé aux professionnels, un magnifique showroom abritant les archives de la maison ferait sans problème concurrence au Musée Galliera, tant il regorge de trésors insoupçonnés et reste le témoin d’une grande tradition française d’excellence.

Ces artisans doivent s’adapter à n’importe quelle commande et couvrent donc plusieurs spécialités : finaliser une ceinture, coudre la doublure d’un sac, ou insérer des cristaux dans les alvéoles d’une broche n’ont aucun secret pour eux. Certaines de « ses petites mains »  sont des stagiaires d’écoles de stylisme ou d’écoles plus spécialisées comme la prestigieuse école Boulle dont l’excellence est reconnue mondialement. Chaque étape est minutieusement exécutée dans les 850 m² de l’atelier : ici on traite le cuir pour les sacs et les ceintures, là les éléments métalliques (fermoir de sacs, boucles de ceintures, structures de broches ou de boucles d’oreilles) sont façonnés avec une minutie incroyable. Un studio permet aux stylistes de penser aux futures créations, tandis qu’au sous-sol les pièces sont contrôlées dans un ultime souci de qualité avant l’envoi de la création.

Edgar Hamon est à l’heure actuelle le seul parurier haut de gamme à Paris à travailler le métal et le cuir ainsi que la résine et le tissu. La Maison, fondée par Edgard Hamon en 1919, fabrique alors des boutons de bottines et de guêtres pour les maisons de « l’Age d’Or de la Haute Couture » : Chanel, Lanvin, Grès, Fath, Balenciaga, Balmain, Dior… De cet atelier sont même sortis les fameuses brides portées par Mistinguette. Dans les années 50, s’y ajoutent des boutons de vêtements en métal toujours pour ces fameuses Maisons de couture. En 1968, lorsque Yves Saint-Laurent crée sa propre Maison, une collaboration se noue, qui va durer 35 ans. La même année, un autre Grand de la Couture, Hubert de Givenchy, devient client d’Edgard Hamon. Le parurier se réoriente alors vers des ceintures qui immédiatement font l’unanimité tant la qualité de leurs finitions sont sans pareil. En 1999 la société est vendue avec la Maison Yves Saint-Laurent au Groupe Gucci, qui envisage la clôture de l’atelier Edgard Hamon dans une logique purement financière.

C’est alors que Jean Bergeron – ancien président délégué du Comité Colbert et ardent défenseur du patrimoine culturel français – rachète Edgard Hamon aux Italiens perpétuant les idées du Comité en ne laissant pas mourir l’un des derniers acteurs authentiques de l’image mondiale du Paris du Luxe. Il va communiquer son énergie à l’entreprise et confier la direction à Carole Lamotte. Son intuition ne l’a pas trompé : l’atelier a trouvé un second souffle. Pendant presque un siècle, le savoir-faire de la Maison Edgard Hamon ne s’est jamais dévoilé à l’extérieur du cercle restreint des Maisons de Luxe. En mars 2010, l’atelier a décidé de faire profiter de son savoir-faire au grand public et lança sa propre ligne de sacs, ceinture et bijoux, portant très humblement le nom « A l’Atelier » et accessible exclusivement sur son site Internet http://www.alatelier-style.fr, personnalisables selon le goût de chaque cliente.

Cette première collection se compose de deux modèles de sacs : le  » Victoria » en paille tressée pour l’été et en tweed pour l’hiver et « l’Adélaïde » en cuir bicolore, avec pochettes et trousses à maquillage assorties, plus une ceinture bicolore et réversible. S’y ajoutent des bijoux en argent massif et cuir de vachette ou en satin de soie, des bracelets jonc ou tressé, un modèle de bague, des boucles d’oreille, un collier, un ras du cou, un sautoir et un porte-clés. Toute une gamme d’accessoires chics mais intemporels pour une femme contemporaine et bientôt pour l’homme, la ceinture réversible ayant beaucoup de succès, un modèle homme sera proposé. Les modèles ont été conçus par le bureau de style d’Edgard Hamon, et sont créés par l’atelier. La cliente choisit les matières et les couleurs qu’elle désire dans les gammes d’échantillons présentées sur le site. Puis, l’atelier reprend la main et réalise la commande en 4 à 6 semaines.

Résultat : une commande totalement personnalisée pour un modèle unique façonné selon les critères de la Haute-Couture et un savoir-faire entièrement français. Cette initiative est le plus bel exemple de la nécessité de conserver ces ateliers qui font la grandeur de la Haute-Couture comme le pense Jean Bergeron, « …le jour où les artisans de la Haute Couture l’auront quitté, Paris ne sera plus Paris« … Mais la plus belle conclusion lorsqu’on repense à ce savoir-faire est une phrase de Carole Lamotte : « C’est dans le détail qu’est le luxe« . Et le moins qu’on puisse dire, c’est qu’elle a oh combien raison.

Marie-Odile Radom