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Impertinence Gaultier -Vernissage au Musée des beaux-arts de Montréal

by Alessandro @thecaprissimo
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« Créateur non conforme recherche mannequins atypiques — gueules cassées ne pas s’abstenir. »

Le Musée des beaux-arts de Montréal (MBAM) présentera, du 17 juin au 2 octobre 2011, La planète mode de Jean Paul Gaultier: de la rue aux étoiles, la première grande exposition consacrée au célèbre couturier français qui débuta dans le prêt-à-porter en 1976 avant de fonder sa maison de haute couture en 1997.
L’exposition a été amorcée, produite et mise en circulation par le MBAM à l’occasion des 35 ans de mode de Jean Paul Gaultier.
Depuis quelques semaines, deux proches collaborateurs de Jean Paul Gaultier sont venus à Montréal pour travailler, sans répit, à l’exposition du designer, dont une autre muse, le mannequin Tanel Bedrossiantz.
Jean Paul Gaultier est arrivé à Montréal depuis quelques jours pour mettre les dernières touches à son exposition au Musée des beaux-arts. La grande aventure a commencé mardi 14 juin avec un prestigieux tapis rouge pour une soirée de vernissage à laquelle Luxsure était conviée.
Le carton d’invitation est en soi une chronique pour élégance pour les 2000 convives!

Parmi les invités, le fondateur du Cirque du Soleil, Guy Laliberté, le cinéaste Denys Arcand et la productrice Denise Robert, Isabelle Boulay, Virginie Coossa, Évelyne Rompré, le designer québécois Denis Gagnon, le metteur en scène Denis Marleau, la mannequin canadienne Coco Rocha, la chanteuse Luz Casal, le mannequin Ève Salvail, l’ex-mannequin québécois Francisco Randez, qui a été l’image du parfum Jean Paul Gaultier Le Mâle, les célèbres photographes de mode Max Abadian et Steven Klein, une muse de Gaultier, Farida Khelfa, ainsi que la mannequin américaine gros format Stella Ellis.
Malgré les invitations lancées à Madonna, qui a prêté ses précieux corsets de scène au musée

Lady Gaga, ainsi que Julia Roberts, qui tournera à Montréal dans le film Blanche-Neige, elles ne se sont pas présentées. Seule Arielle Dombasle a confirmé son glamour. Elle était splendide!
En matinée avait déjà eu lieu la conférence de presse, au MBAM, en présence de Jean Paul Gaultier, de Nathalie Bondil, directrice et conservatrice en chef du musée, de Thierry-Maxime Loriot, commissaire de l’exposition et responsable du catalogue (ex-mannequin de Giorgio Armani ).

Nathalie Bondil Jean Paul Gaultier Thierry-Maxime Loriot – source : William Mazzoleni

« Plus que sur tout autre couturier, je voulais réaliser une exposition sur Jean Paul Gaultier pour son humanité », explique Nathalie Bondil, directrice et conservatrice en chef du Musée. « Au-delà de la virtuosité technique résultant de l’exceptionnel savoir-faire des différents métiers de la haute couture, d’une imagination débridée et de collaborations artistiques historiques, il offre une vision ouverte de la société, un monde de folie, de sensibilité, de drôlerie et d’impertinence où chacun peut s’affirmer comme il est, un monde sans discrimination, une « couture fusion» unique. Il y a chez ce créateur, sous couvert d’humour et de légèreté, une vraie générosité et un message social très fort. »
Thierry-Maxime Loriot, commissaire de l’exposition, a approfondi avec Jean Paul Gaultier ses liens, tant personnels que professionnels, avec le Québec qui l’ont conduit à accepter de revisiter ses trente cinq ans de mode dans le cadre d’une exposition initiée et organisée par le Musée.

L’interview:

Vous avez toujours refusé qu’un musée produise une exposition sur l’ensemble de votre travail, pourquoi avoir accepté de le faire avec le Musée des beaux-arts de Montréal?
Jean Paul Gaultier. J’étais à la fois surpris et flatté lorsque Nathalie Bondil m’a proposé de faire cette exposition. Je croyais que c’était quand même un peu tôt pour avoir une rétrospective, car je ne suis pas si vieux que ça! Je le vois comme un compliment. Je connaissais déjà certaines expositions produites par le Musée des beaux-arts de Montréal, mais c’est vraiment lorsque j’ai rencontré l’équipe, il y a deux ans, que je me suis lancé dans cette nouvelle aventure. Je préférais aussi l’idée d’une présentation thématique plutôt que chronologique, une expérience ludique qui ne serait pas cloisonnée, ce qui correspond à mon univers. Une approche chronologique classique aurait donc évoqué en quelque sorte une fin, ce qui n’est pas le cas, car ma maison de couture est toujours bel et bien active.

Qu’est ce que le grand public et ceux qui sont moins familiers avec votre travail vont découvrir dans cette exposition?
J. P. G. Ma vie c’est mon travail, donc avec cette exposition, je crois que vous allez tout savoir de moi! C’est une nouvelle aventure, car mes modèles seront présentés d’une nouvelle façon. Ce sera en quelque sorte le plus grand défilé que j’aurai fait, mais aussi ma plus grande collection dans un certain sens, car l’exposition sera divisée en six thèmes qui reviennent souvent dans mon travail. Ce ne sera pas un défilé certes, mais une installation; c’est ainsi que nous avons travaillé ensemble avec l’équipe du Musée. C’est une nouvelle manière de présenter mes créations et, surtout, de donner un accès à la haute couture qui malheureusement n’est jamais montrée au grand public. Vous verrez mes principales « obsessions », qui se sont dégagées de mes collections au cours des trente-cinq dernières années — même plus, quarante, car ma première robe à l’époque de chez Cardin, avant que je lance ma propre marque de prêt-à-porter, sera exposée! Les corsets, la sexualité ; le masculin-féminin et le féminin-masculin, mais aussi les métissages qui rapprochent les cultures du monde. C’est vraiment excitant de pouvoir présenter ce projet partout à travers le monde: mes vêtements deviennent mon passeport pour visiter toutes les villes où elle sera présentée !

Vous aviez des liens avec le Québec avant de travailler avec l’équipe du MBAM?
J. P. G. J’ai toujours eu une attirance pour la culture, la musique et le cinéma québécois — ah, et aussi la cuisine! La première fois que je suis venu au Québec dans les années 1980, je suis tombé amoureux de l’endroit, des gens. Montréal, c’est un peu comme venir à la maison parce qu’il y a un peu de Paris, mais aussi le côté grande ville nord-américaine comme New York. J’ai travaillé avec plusieurs mannequins québécois, notamment Ève Salvail pour plusieurs de mes défilés et la première publicité de mon parfum Classique, avec Francisco Randez pour mes publicités de parfum Le Male, et plusieurs autres modèles pour mes défilés tels Marc Parent et Yasmeen Ghauri dans les années 1980, mais aussi Emmanuel Rosado et Judith Bédard.

Parcours d’Exposition Par Luxsure

En montant les marches, on croise quelques mannequins dont les visages sont animés par la vidéo. Des présences surprenantes toutes habillées de Gaultier, qui soliloquent, observent silencieusement, ou même parfois chantent… Cette technique très particulière de la projection vidéo sur un visage en trois dimensions entremêle un savoir-faire technologique mais aussi artisanal, celui de la projection sur le masque.
En effet, sur la tête moulée de l’acteur est projetée sa propre image vidéo : c’est l’image d’un visage qui retrouve sa forme.
Ce travail sur le personnage vidéo a été développé depuis plus d’une quinzaine d’années par Denis Marleau avec UBU, sa compagnie de théâtre à Montréal. Il est en outre le concepteur du spectacle Les aveugles, en tournée dans le monde depuis 2002, sans acteurs vivants sur scène, mais avec les douze masques vidéographiques de deux acteurs dupliqués. C’est par cette création marquante, puis une seconde fois avec Une fête pour Boris en 2010, que Jean Paul Gaultier a connu, au Festival d’Avignon, le travail du metteur en scène québécois.
Pour ce projet, Denis Marleau a conçu des mannequins dont la présence vivante tour à tour décalée, poétique ou joyeuse se rapproche de l’esprit de l’art de l’installation, avec la participation de plusieurs interprètes dont Ève Salvail, Francisco Randez, Melissa Auf der Maur, Virginie Coosa et Suzie Leblanc, parmi d’autres, apportant ainsi un peu de leur recherche artistique en connivence et au service de l’univers fascinant de Jean Paul Gaultier.
Les sections de cette exposition multimédia offrent une approche thématique de l’univers créatif de Jean Paul Gaultier, traçant l’itinéraire imaginaire du couturier qui cherche son inspiration depuis le pavé parisien jusqu’à l’univers de la science-fiction en 6 étapes
Miroir sociétal qui marque plusieurs époques, ce parcours, que Gaultier considère comme « son plus grand défilé », est ponctué par de nombreux extraits vidéo, parfois inédits, ainsi que de nombreux tirages pour la plupart jamais exposés, provenant des plus grands noms de la photographie de mode et des arts, notamment Andy Warhol, Cindy Sherman, Robert Doisneau, Richard Avedon, Herb Ritts, Pierre et Gilles, Mario Testino, Mert Alas et Marcus Piggott, Inez Van Lamsweerde et Vinoodh Matadin, Ellen Von Unwerth et Bettina Rheims, pour en nommer quelques-uns.

1. L’odyssée de Jean Paul Gaultier
La Marinière à épaulettes de Jean Paul Gaultier m’emballe. Sachez que sa grand-mère maternelle possédait un téléviseur, ce qui est peu fréquent en France à cette époque, et le laissait libre de regarder ce qui lui plaît. Fasciné par les Parisiennes singulières, Jean Paul Gaultier créé une nouvelle silhouette et privilégie les beautés atypiques : « Enfant, mon oeil était toujours attiré vers celles qui n’étaient pas comme les autres… »

2. Le boudoir
J’ai appris que sa grand-mère maternelle, Marie, l’a initié très jeune à la mode féminine et lui a fait découvrir Falbalas, un film de Jacques Becker racontant l’ascension d’un jeune couturier, qui le marque profondément. Gaultier exhume des placards de son aïeule des corsets du début du siècle et des guêpières des années 1940, pour créer de nouveaux classiques comme les dessous portés dessus et les soutiens-gorges obus. De prés, je ressens que ses robes-corsets sont un symbole de pouvoir et de sensualité dans la garde-robe de la femme moderne.

3. À fleur de peau
J’ai aimé comment la peau et le corps sont les inépuisables sources d’inspiration de Jean Paul Gaultier. Dans ses mains, les matières deviennent des « secondes peaux ». Il explore les possibilités du trompe-l’oeil avec des imprimés de corps écorchés vifs ou tatoués. Sa fascination pour la peau nourrit son imagination et guide ses créations, qui marient romantisme et fétichisme.
À la dictature de la minceur, il oppose la sensualité de la taille XXL et lance un formidable message : soyez vous-même, quelles que soient les particularités dont la nature vous a doté ! Au lieu de la Scandinave blonde et diaphane, il impose le mannequin de caractère. Pour ses défilés, il organise ses premiers castings sauvages et recrute par le biais des petites annonces : « Créateur non conforme recherche mannequins atypiques — gueules cassées ne pas s’abstenir. »
C’est là ou je croise Rick Genest, le all-tatoué mannequin de Montréal, muse de Nicola Formichetti (DA de Mugler et Fashion-in-Chief de Lady Gaga). Surprise! On se toise. Je souris. Je lui murmure : ‘Que pensez-vous de l’exposition? Jean-Paul is a Gaultier! De chic et de bon goût!

Rick Genest & Alessandro |@thecaprissimo

4. Punk cancan
Couturier à l’âme punk, il adopte cette idée du décalé et du recyclage, le dénuement l’obligeant à être inventif. La rébellion totale, l’aspect trash et destroy, l’attirent : « …le côté brut du punk avec ses coiffures de Mohican, ses maquillages presque tribaux, sa touche sexe, les bas résille déchirés, le noir, les kilts, les sangles, le mélange des genres, les matières… tout cela me parlait et me correspondait plus que certains codes figés de la couture. » et Manu Militari parfois ….

5. Jungle urbaine
Fasciné par les différences, Jean Paul Gaultier voit dans les mondes intouchés par la standardisation de la mode des terrains d’exploration stylistique. Par transpositions, détournements et assemblages, il donne forme à des métissages transfrontières. Les mondes et les individus séparés par le barrage de la langue, des coutumes et de la géographie se mélangent dans un univers où le passeport est tamponné « Planète Gaultier ». Le couturier orchestre par le vêtement le dialogue entre les cultures.
Il imagine une société cocktail, mélangée, brassée, épicée, panachée, décloisonnée. Résultat d’un melting-pot décliné au singulier, ce ne sont plus des groupes qui se côtoient dans l’indifférence, mais des individus qui racontent chacun notre diversité. Montréal est un témoignage quotidien de cette diversité assumée!

6. Métropolis
Enfant, Jean Paul Gaultier se passionne déjà pour le cinéma et le music-hall, et c’est à travers le petit écran qu’il nourrit sa culture d’autodidacte. La mode l’intéresse alors pour la possibilité d’en faire un spectacle. Il imagine le défilé comme un happening, une invitation au voyage avec sa bande-son originale, ses décors et son casting singulier. En coanimant l’émission Eurotrash, il devient le premier couturier-vedette de la télévision. Ce nouveau statut dans les médias concorde avec la montée en puissance de la mode comme expression phare de la société de l’image. D’ailleurs, ce soir sur TF6, vous ne pouvez pas manquez son interview de Lady Gaga! Le créateur interview la créature!

Créations autobiographiques, créations intimes, créations professionnelles, créations statement , créations culturelles, cette expostion est un dictionnaire de goût. Un dictionnaire très personnel de Jean-Paul Gaultier.
Les créations de sa vie, c’est aussi sa vie avec les créations…

Alessandro | @thecaprissimo de Montréal pour Luxsure

Post-scriptum
Le livre de l’exposition est une magnifique brique de 4,5 kg que j’ai payé 84,95 CAN$ (59 euros)

Le 16 juillet, le plus grand défilé en hommage à Jean-Paul Gaultier sera organisée rue Sainte-Catherine.
À suivre sur Luxsure…

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1 comment

Amylee, artiste peintre 16 juin 2011 - 17 h 13 min

Bravo, super article !

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